Vue du Panthéon, Rome

Aquarelle, gouache, et encre brune, partiellement vernie, H. 775 mm ; L. 1105 mm

Etiquette au dos : Avis
Inscription à l’encre : Pantheon
Marque sur le châssis : GHEH

Provenance : Collection privée, Angleterre (début du XIXe siècle)
Dr Emil Hulmark, Suède

A la fin du XVIIIème – début du XIXème , les artistes et collectionneurs considéraient Louis Ducros comme l’une des figures marquantes des paysagistes parmi les aquarellistes. Son travail se réfère au goût des collectionneurs ayant visité Rome et Naples pendant leur « Grand Tour », et il est destiné à meubler leur intérieur avec des vues topographiques des lieux les plus connus du « Tour ».

Ducros passe ses premières années à Genève puis voyage à Rome en 1778. Il achève une série de paysages et de vues d’anciens monuments lors d’un voyage dans le Royaume des Deux Siciles. Les esquisses faites lui fournissent le vocabulaire artistique et de nombreux motifs qui s’avèreront inestimables. A son retour de Rome, il se consacre à des vues pittoresques destinées aux étrangers. Avec l’imprimeur Giovanni Volpato, il publie, en 1780, le grand format « Vues de Rome et ses environs ». La série fut un grand succès. La vue du Panthéon publiée dans cette série servit de base à notre aquarelle. La seule autre version connue est dans une collection privée à Genève (Cat. exp. A.L.R. Ducros, Paysages d’Italie à l’époque de Goethe, Musée cantonal des Beaux-arts de Lausanne, 1986, p. 81, cat. 29f; cat. 30 mentionne une aquarelle dans une collection privée à Genève, H. 77 cm ; L. 114 cm.).

Sans doute encouragé par le succès de ses gravures romaines et par l’exemple de Jakob Philipp Hackert, John ‘Warwick’ Smith, Carlo Labruzzi et de John Robert Cozens, Ducros entreprend en 1784 une série d’aquarelles, regardées aujourd’hui comme ses œuvres les plus abouties. Il est le premier artiste à utiliser l’aquarelle au-delà de la tradition. Ses dessins sont rehaussés de gouache et touches de vernis pour donner un meilleur effet. Leurs dimensions supposent de joindre plusieurs feuilles de papier jointées et collées sur une toile. Les œuvres étaient encadrées et vernies pour la vente. Elles sont décoratives plus que destinées à un cabinet d’amateur ou portfolios.

Notre aquarelle est un rare exemple de ces œuvres, bien conservé, monté sur sa toile et châssis d’origine , dans son cadre avec les instructions de conservation données par l’artiste lui-même, encore présentes au dos. (C’est exceptionnel. Le restaurateur Olivier Masson note dans son chapitre sur la conservation des aquarelles de Ducros pour l’exposition de Lausanne en 1986 qu’elles avaient du toutes être séparées de leur toile abîmée et montées sur de nouveaux châssis et de nouvelles toiles, sans parler des restaurations des aquarelles elles-même ; voir Jacob, op. cit., p.43. Ducros avait l’habitude de donner ses instructions au dos de ses aquarelles dans l’intention de les protéger. Par chance les instructions pour cette aquarelle sont toujours présentes.)

L’œuvre de Ducros fut largement admiré par les collectionneurs et amateurs du début du XIXème en Angleterre et en Russie et son nom apparaît souvent dans la presse. Parmi ses clients, on compte Catherine La Grande, le Grand Duc Paul, Sir Richard Colt Hoare of Stourhead, Sir John Acton et le roi Gustaf III de Suède. A Londres, ses œuvres sont vendues à des prix très élevés à la vente de la Collection Cawdor en juin 1800, atteignant quatre fois le prix payé par Lord Cawdor lors de son Grand Tour quinze ans plus tôt.

Le Panthéon est le monument le mieux conservé de Rome. Construit par l’Empereur Hadrien en 118-125, il fut transformé en église par le pape Boniface IV en 609. Bernin lui ajoute deux tourelles et deux portes monumentales en 1630. L’aquarelle de Ducros ignore les ajouts baroques du Bernin, en lui conservant l’esprit de son temps, et montre le monument dans son aspect général. Piranèse adopte la même approche en 1761 : la fontaine de la place Rotonde, dessinée en 1578 par Giacomo della Porta, est montrée dans le fond à gauche. Elle est surmontée d’un obélisque découvert en 1711 lors de fouilles près de l’église St Ignace de Loyola.

Nous remercions Madame Annie Gilet pour l’aide qu’elle nous a apporté à la rédaction de la notice de l’œuvre.