Le Christ sur le Lac de Tibériade
Eugène Delacroix (1798-1863)

Le Christ sur le Lac de Tibériade, vers 1853.

Huile sur panneau., H. 0.18 m ; L. 0.23 m

Au verso : tampon Deforges.

Provenance : Fernand Antonin Mercié, Paris, 1918.
Walter Pach, New York Vente Parke-Bernet, New York, 6 janvier 1949, lot 31 (ravalé).
Par héritage de Walter Pach au propriétaire actuel.

Delacroix était profondément attiré par ce sujet biblique montrant Jésus endormi pendant une tempête sur sa barque, ses disciples effrayés dans une mer déchainée. Il mentionne le sujet dès 1824-1826 dans un carnet de notes conservé au Louvre (Carnet du Louvre 1750, inv. RF 9145, cité par Michèle Hannoosh, Eugène Delacroix : Journal, Paris, 2009, t. I, p. 1454-1455.). L’artiste venait de remporter son premier grand succès avec Dante et Virgile aux enfers, dit la Barque de Dante, tableau grand format acheté par l’administration royale suite à son exposition au Salon de 1822.

Dès 1841, Delacroix commence à travailler sur le sujet du Christ sur le lac de Tibériade, et peint les deux premiers tableaux. Il reprend le thème en 1853-1854 quand il exécute quatre autres versions. Ce sont tous des tableaux de relativement petit format, destinés vraisemblablement à des amis ou collectionneurs. Le tableau le plus connu de cette série est celui conservé au Metropolitan Museum de New York, dont notre esquisse pourrait être une étude préparatoire.

L’expressionnisme des figures, la manière impétueuse et lâchée, le coloris sombre et intense suscitent une grande admiration. La version du Metropolitan Museum était montrée, entre autres, lors de l’exposition Maîtres du Siècle (Exposition de Maîtres du Siècle. [1786-1886], avril-mai 1886, Paris, 1886, p. 10, no. 78.), organisée en avril et mai 1886 dans l’ancien atelier de Gustave Doré à Paris. A cette occasion, le tableau a laissé une impression durable sur Vincent van Gogh, qui le mentionne dans six lettres à son frère Théo et à Emile Bernard. Ainsi, Van Gogh écrit à Bernard, le 2 juin 1888 :

« Ah ! cette belle image de Delacroix : ‘La barque du Christ sur le lac de Tibériade’ : Lui – dans tout l’éclat jaune citron de Sa sainteté – est en train de dormir en rayonnant dans la tache formée de violet agité, d’un bleu plu ténébreux et le rouge sang du groupe des disciples remplis d’angoisse – sur les eaux du lac en furie, qui montent jusqu’à tout en haut dans le cadre ! »

Van Gogh à Emile Bernard, 26 juin 1888, dans Fritz Erpel (éd.), Vincent van Gogh. Recueil des lettres, t. 5, Borhheim-Merten 1985, p. 261.
PDF