Le paysan sur la route
Ferdinand Hodler (1853-1918)

Le paysan sur la route, Vers 1881.

Huile sur toile, H. 0.33 m ; L. 0.40 m

Signé en bas à droite : F. Hodler.
Inscription au crayon sur le châssis : appartient à F. Laem[…]

Trois étiquettes au verso :

  • le numéro 822
  • F. HODLER exposition commémorative 1918-1938 / catalogue no. : 45/1890 / titre : Le paysan sur la route / Propriétaire : M. Alfred Dimier / Galerie Moos – Genève – Mai-Juin 1938
  • Kunstverein Oberaargau / Hodler und der Oberaargau / Langenthal, 1992 / Katalog Nr. 108 / Titel: Blick gegen Kirche / Langenthal, 2. Fassung

Provenance : Collection F. Laem[…], Genève
M. Bastard, Genève
acquis en 1923 auprès de ce dernier par Alfred Dimier (décédé en 1952), Genève ; dans l’inventaire dressé de sa collection dans les années 1930, le tableau figure sous le no. 822 : « Paysage avec église et paysan Berne »
ensuite par descendance.

Bibliographie :

Oskar Bätschmann, Paul Müller, Ferdinand Hodler. Catalogue raisonné der Gemälde. Band 1, Die Landschaften, Zurich, 2008, t. 1, p. 138-139, no. 97 [SIK 71007] (ill.).

Orphelin à quatorze ans, Ferdinand Hodler débute comme peintre d’enseignes, puis comme peintre de « vues suisses » fabriquées en série pour les touristes à Thoune. Venu à Genève en 1872, il suit pendant cinq ans l’enseignement de Barthélemy Menn (1815-1893), lui-même élève d’Ingres et ami de Corot. En cinq ans, Menn fait de Hodler un artiste qui affirme d’emblée sa personnalité dans le paysage, le portrait et la grande composition. Inspiration populaire, dessin rigoureux et accusé, mise en page nette et équilibrée, tonalités d’abord sombres aux clairs-obscurs contrastés caractérisent ses premiers travaux. Un séjour à Madrid éclaircit sa palette et confirme son émancipation.

Le paysage permet à Hodler de développer le mieux son puissant tempérament, tout en assouvissant son besoin d’harmonie. Arbres et cours d’eau, mais surtout montagnes et lacs lui fournissent ses motifs préférés, inlassablement repris et transformés. Un sens classique de l’équilibre préside au cadrage et à l’orchestration des formes dans ses lacs en vue horizontale, qui reflètent les chaînes de montagnes couronnées de nuages.

Par sa vision dépouillée et affranchie de tout rendu illusionniste de l’espace, il campa avec autorité un nouvel ordre formel. Quoique très isolé, Hodler a ainsi stimulé la génération des expressionnistes allemands et autrichiens et compte parmi les précurseurs du XXe siècle par sa contribution à l’éclosion du « style 1900 », mais davantage encore par l’apport d’une dimension qui lui est propre : la monumentalité.

La composition de notre tableau est fortement structurée et son ordonnance symétrique montre, déjà en 1881, le « parallélisme » de Hodler. Ce principe de composition consiste à répéter des formes semblables pour conférer au tableau son unité architectonique et décorative. Une ligne horizontale légèrement plongeante coupe le tableau en deux parties égales. Sur presque toute la largeur de cette ligne se déploient les maisons de Langenthal, scandées par des arbres, jusqu’au clocher qui ferme la composition à droite. La route de campagne sur laquelle le vieil homme marche vers le spectateur crée un puissant effet de perspective. A l’endroit où cette route se termine, les lignes de fuite du tableau se rejoignent. Les deux blocs verticaux, la figure du paysan et le clocher, se font écho formel.

Langenthal est un village dans le canton de Berne où vivait Friedrich Neukomm (1832-1895), l’oncle maternel de Hodler qui avait accueilli ses frères et sœurs après le décès de leurs parents. Loin d’être un portrait, la figure du paysan peut être inspirée de cet oncle.