Trois pêcheurs relevant leurs filets
David Teniers le Jeune (1610-1690)

Trois pêcheurs relevant leurs filets

Huile sur toile, H. 0.59 m ; L. 0.45 m

Monogrammée sur la barque : DT.

Provenance : Collection Colien, Paris Vente comte de Vence, Paris, Hôtel de Vence, 10 février 1761, n° 55 Vente Blondel de Gagny, Paris, Hôtel de Gagny, 10 décembre 1776, n° 83 Palais Stroganoff, Léningrad, durant tout le XIXème siècle Vente Stroganoff, Paris, Galerie Georges Petit, 22 mai 1924, n° 15.
Collection Dr. Mañuel R. Espirito Santo Silva.

Bibliographie :
  • DESCAMPS, Jean-Baptiste, La vie des peintres flamands, allemands et hollandais, tome II, Paris, 1754, p. 159.
  • RÉMY, Pierre, Catalogue des livres, tableaux, dessins, et estampes de feu M. le comte de Vence, Paris, Prault, 1760, n° 55.
  • SMITH, John, A catalogue raisonné, Tome III, Londres, 1831, n° 82.
  • SMITH, John, A catalogue raisonné, Tome IX (supplément), Londres, 1842, n° 59.
  • KLINGE, Margret, David Teniers the Younger: paintings – drawings, Anvers, Snoeck-Ducaju, 1991, p. 166-167.
  • KLINGE, Margret ; LÜDKE, Dietmar, David Teniers der Jüngere 1610-1690, Alltag und Vergnügen in Flandern, catalogue d’exposition, Staatliche Kunsthalle Karlsruhe, Heidelberg, 2005, p. 37.

Elève de son père, David Téniers le Jeune se fait connaître en tant que peintre de genre, tout en s’essayant au portrait, au paysage et à la peinture d’histoire. Reçu maître dans la guilde d’Anvers en 1632, il épouse la fille de Jan Brueghel l’Ancien, par ailleurs pupille de Rubens. Cette union l’introduit dans le cercle des intimes du célèbre artiste flamand qui influence durablement sa manière. Devenu en 1645 doyen de la corporation de Saint-Luc à Anvers, Téniers est nommé en 1647 peintre de cour et conservateur des collections de l’archiduc Léopold-Guillaume, gouverneur des Pays-Bas. Ce dernier le fait connaître aux cours européennes, et Philippe IV d’Espagne, Guillaume II d’Orange et Christine de Suède collectionnent ses œuvres. Il s’implique particulièrement dans la fondation de l’Académie d’Anvers, dont il est nommé premier directeur en 1663.

Dans la grande tradition anversoise des Francken, des Bruegel, ou encore d’Adriaen Brouwer et Sébastien Vrancx, David Téniers peint majoritairement des scènes de la vie quotidienne dont il n’a de cesse d’élargir et de renouveler les tendances. Intérieurs bourgeois, estaminets ou des tabagies, fêtes paysannes et travaux de la vie rurale, sont autant de prétextes à exprimer sa virtuosité débonnaire. Il les peints de sa touche légère et sûre, apte à rendre avec une exactitude calculée la consistance d’une matière, mise également en valeur par les jeux de couleurs et de lumières d’une grande subtilité.

Présenté au Palais Stroganoff durant tout le XIXème siècle, notre tableau est décrit en ces termes dans le catalogue de la vente de cette collection : « La mer, soulevée par le vent du large, se brise au fond d’une anse que protège, à droite, une digue et des palissades de pieux. Un Pêcheur, debout dans une barque dont on n’aperçoit que l’avant, tient le cordage d’un filet dont deux autres pêcheurs soulèvent une extrémité. Ils sont entrés dans la vague, chaussés de hautes bottes ; l’un, vu de dos, est coiffé d’un bonnet rouge. Des voiliers passent au large et un arc-en-ciel décrit, au fond, derrière une tour à toit de tuiles roses, son orbe harmonieux. »

Cette œuvre témoigne d’une palette moins connue de Téniers, caractéristique des années 1640-1650, durant lesquelles l’artiste privilégie les teintes argentées et lumineuses. Dans La vie des peintres flamands, allemands et hollandais publiée en 1754, l’historien d’art Jean-Gabriel Decamps en souligna la finesse.

« Il en a fait plusieurs [tableaux] où tout est clair, et qui surprennent pour les effets. M. le Comte de Vence, a dans son Cabinet à Paris, un Tableau dans ce genre ; c’est une Pêche où l’on voit un ciel clair, ainsi que l’eau de la Mer, et la principale figure est un homme en chemise, &c. Téniers prouve donc que ce n’est pas toujours par des couleurs différentes qu’on peut produire cette harmonie, et que c’est souvent au seul mélange que l’on doit l’artifice de répandre la vapeur et de masquer sensiblement les dégradations de différents plans. »